Entretien avec Mirabelle Thovex

Nous avons recueilli les confidences de Mirabelle Thovex, 9e des Jeux Olympiques de Pyeongchang en snowboard halfpipe.

20e aux Jeux de Vancouver 2010, 10e à Sochi 2014, 9e à Pyeongchang 2018… A 26 ans, Mirabelle Thovex est en progression constante sur son snowboard lors de l’épreuve reine, les Jeux Olympiques. Adepte du snowboard halfpipe et soeur de Candide, Mirabelle Thovex est une vraie amoureuse de son sport, une passionnée qui vibre lors des JO et lors de toutes les compétitions, en fait. La rideuse de La Clusaz fourmille de projets, tient son grand frère en haute estime et a décidé de rempiler pour la compète, après ces Jeux de Pyeongchang forts en émotions. Mirabelle a accepté de se confier en interview au Mag’ d’Adrenaline Hunter, pour 20 minutes d’échanges à bâtons rompus…

– Mirabelle, tu as seulement 26 ans et tu as déjà participé à trois Jeux Olympiques, où tu affiches une progression constante. Qu’est ce que représentent les Jeux à tes yeux ?
Ils représentent beaucoup (sourire), comme pour beaucoup d’athlètes, je pense. Les Jeux représentent un peu la concrétisation de notre travail depuis toutes ces années… J’ai eu des expériences différentes à chaque Jeux, mais à chaque fois ce fut une énorme fierté, j’étais hyper heureuse de participer à cet événement. C’est un événement exceptionnel qui n’arrive qu’une fois tous les quatre ans, avec des sélections bien rudes… Je suis donc fière de pouvoir participer aux Jeux à chaque fois !

– Un mois après, quelles images gardes-tu en tête de ces Jeux de Pyeongchang ?
Un mois après… Pff… Il y en a plein des images !  Que ce soit le village olympique et la vie avec tous les athlètes, mais aussi la cérémonie d’ouverture, assez exceptionnelle puisqu’on se retrouve dans un stade rempli de monde, à regarder tous les gens qui nous applaudissent… Je pense aussi aux médailles de tous mes coéquipiers, qui ont été incroyables, j’étais très heureuse pour eux à chaque fois.  Au niveau de la compétition, j’ai été super heureuse d’être en finale… J’étais tellement concentrée et dans ma course que je n’ai certainement pas profité de tout ce qu’il y avait autour de moi. Je pense que c’est quelque chose de normal… Mon entourage était loin, ils ne sont pas venus en Corée, et de savoir que tout le monde me regardait génère des souvenirs assez exceptionnels.

– Tu as d’ailleurs profité des Jeux pour discuter avec le porte-drapeau Martin Fourcade…
(Rires) Oui, on discute tous entre nous et c’est vrai qu’à un moment nous nous sommes retrouvés à échanger… J’étais avec Sophie Rodriguez, ma coéquipière qui connaît bien Martin puisqu’elle était à l’école avec lui, et il nous a raconté comment se déroulait une course de biathlon. On avait quelques questions et il a su nous renseigner à ce sujet (rires).

– As-tu des regrets concernant cette 9e place en finale olympique, par exemple de ne pas avoir tenté ton 900, ou n’est-ce que du positif ?
En soi, je pense que si on m’avait dit l’année dernière que j’allais faire 9e aux JO, j’aurais été super contente. C’est vrai que cette année j’ai eu de bonnes performances, j’ai terminé entre 4 et 8 toute la saison. J’espérais donc beaucoup de ces JO, je m’étais préparée pour et je voulais faire quelque chose de bien voire très bien (sourire). J’étais contente de cette 9e place, car je pense que j’ai quand même bien ridé et que mon run était bon, mais j’aurais espéré faire mieux… Cela étant dit, le niveau était hyper élevé, avec la plus grosse finale que l’on ait jamais disputée. Rien que le fait de participer à une finale avec autant de filles d’un niveau aussi élevé était déjà incroyable ! Un mois après, je me rends bien compte que je ne regrette pas, je suis vraiment contente de ce que j’ai fait…

– Un mot sur Chloé Kim, sacrée à seulement 17 ans ?
Chloé Kim, de toute façon on s’en doutait quand même (sourire), on savait qu’elle allait faire quelque chose d’incroyable… Elle a super bien ridé toute la saison, elle a eu de super bons résultats et c’était amplement mérité. Le niveau qu’elle a à son âge est incroyable. Je pense que l’on n’est plus surpris car cela fait des années maintenant qu’elle affiche ce niveau-là, qu’elle progresse chaque année et qu’elle reste au-dessus du lot.

– As-tu des petits scoops sur les coulisses de ces JO de Pyeongchang ?
Je peux vous dire que je n’avais pas reçu ma housse de snowboard à mon arrivée en Corée, j’ai dû faire mes entraînements avec des boots de location ! (rires). C’est un petit scoop pas très drôle, mais maintenant c’est assez marrant à divulguer. Au début cela m’a un peu déconcentrée car je n’étais vraiment pas contente de ne pas avoir ma housse, cela m’énervait un petit peu… Au final, j’ai seulement disputé le premier entraînement sans mes boots, et cela ne s’est pas si mal passé. Une fois que j’ai reçu ma housse, j’ai réussi à me reconcentrer et à me remettre dans la course. Je n’ai pas trop d’autre scoop, désolée (sourire).

– As-tu eu le temps, à Pyeongchang, d’aller soutenir tes petits camarades de l’équipe de France olympique, notamment dans les disciplines du freestyle ?
On a dû repartir quelques jours plus tard et nous n’avons donc pas pu aller voir les épreuves de ski halfpipe, ni le Big Air. En ce qui concerne le slopestyle, il avait lieu pendant nos entraînements, c’était donc là aussi un peu compliqué… Mais nous en avons profité pour aller voir d’autres disciplines, comme la descente, le biathlon et le boarder cross. A Sochi ou à Vancouver, Sophie et moi avions également fait cela, c’est vraiment chouette d’aller admirer d’autres disciplines que l’on ne connaît pas…

– A Vancouver, tu avais seulement 18 ans. Les Jeux Olympiques sont-ils un accélérateur par rapport à la vie d’un champion, font-ils mûrir plus vite ?
Oui oui, complètement ! A Vancouver j’avais 18 ans, j’étais super contente, j’étais qualifiée mais je ne me rendais pas compte de ce que c’était… Je n’avais jamais vu autant de caméras autour de moi, je n’avais jamais vu autant de monde regarder un pipe… Sur ces premiers Jeux, j’avais été un peu impressionnée, tellement impressionnée que j’en avais un peu perdu mes moyens, je n’étais pas préparée ! A Sochi, je me sentais prête, je savais ce qui m’attendait, j’avais grandi un petit peu… J’avais donc atteint la finale olympique, comme à Pyeongchang, où je m’étais encore plus préparée qu’à Sochi. J’évolue vraiment au fur et à mesure, via les olympiades qui sont une étape-clé.

– Comment t’es-tu préparée à ces Jeux ?
Au niveau physique, j’ai suivi ma préparation classique parce que je ne voulais pas bouleverser toutes mes habitudes. Au niveau de l’entraînement sur la neige, j’ai mis une plus grosse dose d’entraînement… Au printemps 2017, nous étions partis à Laax, cela constituait la meilleure période pour s’entraîner car la neige est molle, il fait beau et chaud et cela donne davantage envie d’apprendre de nouvelles figures. Cette période d’entraînement m’a vraiment fait du bien et je m’en suis rendue compte la saison suivante. Mentalement, je me suis également préparée à ces Jeux, je vois un préparateur mental depuis environ 1 an ½. Il m’a vraiment aidée à progresser et à me préparer à cette olympiade…

-As-tu fait un petit débrief avec Candide au retour de tes différents JO ?
Oui bien sûr, même après toutes mes compétitions ! Il s’intéresse quand même beaucoup à moi, il est là pour moi quand ça va, quand ça ne va pas (sourire), je lui demande conseil… On fait donc toujours un débrief, en effet ! En période de compète, on est loin donc il m’aide par téléphone. C’est mon grand frère, et comme tous les grands frères, c’est un peu mon confident. A la maison, je vais tout le temps faire du snow avec lui, là j’en reviens d’ailleurs ! Il m’aide à pousser mes limites car j’ai envie de le suivre, de l’impressionner, c’est quand même mon grand frère… Il m’aide pas mal là-dessus, à dépasser mes limites (sourire).

-Peux-tu nous rappeler ce qui t’a poussée vers le halfpipe ?
En gros, j’ai fait un peu de tout lorsque j’étais jeune, comme tous les jeunes qui débutent… j’ai un peu tout essayé ! On avait un halfpipe à la Clusaz à l’époque et c’est vrai que ça me plaisait bien… Du coup, je faisais de plus en plus de bons résultats là-dedans, je faisais tous mes entraînements dans le pipe et j’avais envie de rester dans cette discipline. C’est venu un peu naturellement, c’était… un choix naturel (sourire).

-Qu’est ce quî te plaît le plus dans cette discipline ?
Le halfpipe, c’est du freestyle et j’aime beaucoup ce côté freestyle, on n’a pas besoin d’aller le plus vite possible, on ne nous impose pas des piquets ou quoique ce soit… On fait un peu ce qu’on veut, j’aime bien ce côté artistique, je me sens un peu plus libre que si j’étais dans un slalom !

– Comment as-tu occupé ton temps depuis un mois ?
Je me suis reposée un petit peu, même si je ride quand même tous les jours lorsque je suis chez moi… J’avais besoin de sortir un peu du pipe et de faire autre chose, de me faire plaisir sur mon snow. Je suis partie aux Etats-Unis car nous avions l’US Open à Vail (du 5 au 10 mars, ndlr), j’étais invitée donc j’y suis allée car c’est un événement qui est top… J’avais envie de refaire une compète après les Jeux ! Et j’ai fait comme aux Jeux, j’ai fait neuvième (sourire). Depuis, je suis rentrée, je fais du snow tous les jours et j’essaie de penser à l’avenir, de me fixer de nouveaux objectifs. Les JO sont une grosse étape, cela faisait un moment que je ne pensais qu’à ça, que j’étais concentrée là-dessus… Je dois désormais me fixer de nouveaux objectifs, repartir vers l’avant, ça avance petit à petit !

– Pratiques-tu d’autres sports de glisse ou extrêmes en parallèle du snowboard halfpipe ?
Je pratiques d’autres sports, comme le surf, mais je ne suis pas spécialement très forte… J’aime bien tout ce qui est wake, wakesurf, j’aime bien faire un peu de skate. Je ne suis pas très forte mais je prends beaucoup de plaisir ! Ce n’est pas un sport extrême mais j’aime également beaucoup la rando, avec les paysages que l’on a à La Clusaz c’est quand même une activité plutôt sympa à faire l’été !

-De nouveaux sports vont faire leur entrée aux Jeux Olympiques 2020 comme le surf, le skate, l’escalade… Penses-tu que ce soit une bonne chose ?
Je ne sais pas trop quoi en penser, je ne suis pas assez immergée dans ces sports pour savoir si c’est bien ou pas. Je n’ai pas trop d’avis à ce niveau-là !

-As-tu une idole, fille ou garçon, dans l’univers des sports extrêmes ?
Mon frère (rires)… Oui, mon frère ! C’est quand même mon grand frère. On est quand même super proches et je sais le travail qu’il y a derrière toutes ses vidéos. Il m’impressionne, comme certainement tous les grands frères impressionnent leur petite sœur… mais il m’impressionne tous les jours !

– Ton Top 5 des snowparks en France et dans le monde ?
En France, je dirais Méribel, c’est le meilleur snowpark que j’ai vu. Dans le monde, j’adore le snowpark de Mammoth, celui de Laax, en Suisse, est vraiment top également… A Breckenridge, on n’est jamais déçus non plus !

-Tu parlais de tes nouveaux objectifs, quels sont tes projets désormais ?
Avec la saison que j’ai faite, je n’ai pas envie d’arrêter la compétition tout de suite et je sens que j’ai encore une marge de progression. Je pense que j’ai la possibilité d’avoir de meilleurs résultats que ceux que j’ai eu cette année, j’ai vraiment envie de continuer. Les championnats du monde de Park City arrivent l’hiver prochain, je vais donc poursuivre les compétitions… J’aimerais cependant bien faire des petites vidéos également, toute seule ou avec mon frère.

– Le mot de la fin, un message à faire passer ?
Je remercie toutes les personnes qui m’ont soutenue dernièrement, que ce soit mes proches, mes amis, ma famille ou les gens avec qui je travaille tout au long de l’année : ma coach, mes préparateurs… Je voulais également remercier les gens qui m’ont suivie via les réseaux sociaux !