Les sports de glisse sont nés il y a une quarantaine d’années dans les rues de Venice beach, Long beach, Malibu beach, Hungtinton beach ou encore Redondo beach… en tout cas dans ce coin là. Ce coin qui a des allures de paradis où la liberté est le maitre mot et autorise toutes les folies. Ce qui a permis a certains de pouvoir concrétiser leurs rêves et par conséquent on a pu voir se developper une émergence de nouveaux sports liés à la glisse.
Quelle qu’en soit la cause comme par exemple le manque de vagues qui a poussé les surfeurs à installer des roues sur leurs planches pour retrouver des sensations de glisse. Ou que ce soit grâce à la fameuse sècheresse de 76 qui a vidé les piscines et ainsi favorisé et boosté l’évolution du skate freestyle ou encore la frustration des enfants et petits frères des pilotes de motocross qui souhaitaient avoir un engin pour s’exprimer mais plus léger et plus maniable qu’une moto… Le BMX et le skate sont nés ainsi et tout un tas d’autres disciplines alternatives dans cet endroit où tout semble possible.
L’océan et ses vagues parfaites pour la pratique du surf, accessible à tous les niveaux. Le soleil omniprésent et une chaleur constante. Des spots à perte de vue, quel que soit votre sport. C’est ça la Californie, le paradis du sport et du rêve. Alors forcément, ça aide un peu et quand toutes les conditions sont réunies, l’évolution est rapide et se propage facilement.
Cheveux au vent, lunettes de soleil sur les yeux et short et débardeur fluo, le rider se démarque du sportif lambda par son coté décontracté et cool. Véhiculant ainsi une image très tendance et moderne reprise par toutes les marques depuis, dans tous les univers possibles pour se donner un look branché et avant-gardiste car c’est avant tout ça qui caractérise les sports de glisse. Quand on pense au surf, au roller, au bmx ou au skateboard, on a tout de suite des images de coucher de soleil sur une plage californienne. Et c’est bien normal car c’est de là que tout est parti.
La « terre sainte » comme diraient certains. L’ouest américain est alors devenu le terreau de ce qu’on appelle aujourd’hui les sports extrêmes… Mais 40 ans plus tard, ce berceau du ride a t-il évolué ? Qu’est-il devenu maintenant que le freestyle a explosé dans tous les pays du globe et dans tous les sports possibles ? Qu’en est-il de ce fameux rêve américain ?
En Février 2016, nous sommes partis enquêter sur place avec JC Pieri pour un reportage en immersion à la Mecque du freestyle. Nous sommes surtout allés sur place pour participer à la Legend Jam, une session de bmx flat organisée par la marque St Martin sur la plage de Newport beach avec les meilleurs riders locaux et surtout les principaux acteurs et pionniers de cette discipline.
Une centaine de riders arrivaient d’un peu partout, même de France (Pépé) et venus notamment pour voir la légende vivante du Flatland, Chase Gouin. Originaire du Canada, ce rider hors-norme a une histoire peu banale et c’est par hasard qu’il a vu sa carrière faire un bon de géant suite à une rencontre impromptue avec un gars qui connaissait un certain Kevin Jones (considéré comme le père du flat moderne).
Chase a inventé le riding ambidextre puis le brakeless (sans frein) et influencé la terre entière. Son niveau est tellement haut qu’il ne sera jamais égalé, même 20 ans après ses premiers exploits, personne n’est jusqu’ici parvenu à ce niveau de difficulté tellement il a poussé à l’extrême tous les tricks. À 44 ans, il est toujours au top malgré une sale maladie qui l’a cloué au lit plusieurs années (une allergie qui a flingué son système digestif) sans compter ses tendinites aux coudes. Ce type est un guerrier et sa détermination n’a connu aucune faille. Il n’a jamais fait de compromis dans sa carrière ou ses choix ni vendu son âme au diable. Certes il est un peu barré et boit de la vodka comme on boit de l’eau ou aligne ses casquettes par terre car chacune correspond à un trick particulier et encore beaucoup d’exemples comme ça mais c’est véritablement une légende.
Passer une semaine avec celui qui était l’idole du monde entier et dont j’étais également fan était quelque chose d’unique. Parler d’anecdotes exclusives sur Kevin Jones ou encore sur une hypothétique sortie d’un Dorkin 11 était quelque chose de vraiment appréciable. À force de le considérer comme un véritable dieu pendant un quart de siècle, il a fini par penser qu’il en était pas loin mais quand il monte sur son bike, l’énergie et la puissance sont intactes et font encore leur effet.
Autre célébrité rencontrée à Newport, Mark Gray. Même si lui n’est pas vraiment connu pour son riding, tout le monde le respecte car c’est un collectionneur et restaurateur réputé de matos old school qui suit la scène bmx américaine depuis que ce sport existe. Sa baraque située en face de l’océan est un véritable musée du 20 pouces. Du vélo de Mat Hoffman quand il a réalisé son fameux record en big air au numéro 0 du Haro freestyler (premier cadre de bmx freestyle au monde), il n’y a que des pièces collector dans cette baraque. Le temps s’arrête dans cette maison où on peut retrouver toute l’histoire du BMX dans quelques mètres carrés. Sa pièce maitresse est indiscutablement le fameux vélo en or de Dave Mirra. Le Miracle boy nous ayant quitté quelques semaines plus tôt, l’émotion était encore intacte et le simple fait de toucher ce vélo était assez troublant.
Autre légende présente sur ce spot, la star locale de Venice beach, l’incommensurable Jesse Puente. Un rider qui a inventé la plupart des tricks actuels comme time machine ou plastic man par exemple et malgré son âge (qu’on n’a pas le droit de dire), on dirait un gamin sur son vélo. Il n’a rien perdu de sa dynamique ni de son agilité sur le bike. Mais malgré un statut de Légende, Jesse vit aujourd’hui dans la rue, dort dans un garage et gagne sa vie en faisant la quête après ses street shows sur la plage. C’est fou de se dire que les plus grands champions de BMX, ceux qui nous ont tant fait rêver quand on était minots, sont aujourd’hui quasiment des clochards. Une dévotion sans faille et une vie entière consacrée à ce sport sans jamais dévier d’un iota sur leur motivation et leur vision, voilà ce qui d’un coté en fait des riders exceptionnels mais de l’autre, la vie réelle n’est pas toujours aussi rose qu’on pourrait le croire.
La Californie, ce paradis terrestre a pris un coup de vieux. Personne n’ose le dire car c’est une destination qui fait toujours rêver mais force est de constater que niveau évolution, Darwin aurait honte de cette région. Les sports de glisse sont bien nés là-bas mais rien n’a vraiment bougé depuis.
Lors de cette jam sur le mythique spot de Newport beach, la quasi-totalité des riders avaient une bonne quarantaine d’années au compteur et surtout leur style et vélo aussi. On peut rider encore à 40 ou 50 ans, le problème n’est pas là (et j’en sais quelque chose) mais rien n’oblige à rester bloqué dans les années 70 ! Tandis que les riders du monde entier sont portés et influencés par les scènes japonaises et européennes, les américains restent figés dans leur belle époque glorieuse du fluo et du fun. Protections, gants, freins, et vélos oldschool pour des tricks qui le sont tout autant, voilà à quoi ressemblent les riders de Californie.
Et à part l’époustouflant Ahmed Johnson, pas vraiment de sang neuf. Celui qui a mis le feu était incontestablement Martin Aparijo, 53 ans au compteur et toujours aussi stylé. Mais celui qu’on surnommait « the chairman » avec son éternel sourire qui ne le quitte jamais, est lui aussi resté bloqué à son époque de gloire et donc ses tricks aussi.
La Californie s’est un peu trop reposée sur ses lauriers et ses acquis selon moi. Pas besoin d’évoluer quand on a créé le concept ? Je n’en suis pas convaincu mais je respecte cette mentalité et les gars sont aussi fiers qu’heureux sur leur bike donc on ne leur reproche rien. D’ailleurs les shops sont full en matos old school et pas moyen de trouver une pièce new school (car j’avais cassé ma fourche et je cherchais à la remplacer).
Le marché américain est quasiment inexistant pour une marque new school et justement l’autre raison de ce séjour était d’accompagner un entrepreneur français qui venait faire du bizz aux States (pour la marque St Martin). On a donc visité l’usine de S&M et dealé avec eux pour une prod de pièces signatures pour Chase avant d’aller faire un tour à Las Vegas et à Red Rock (mais ça c’est une autre histoire…).
La région située entre Los Angeles et San Diego est toujours la terre promise du ride car on s’y sent bien et on ne désire qu’y rester mais ce n’est pas là que vous trouverez les dernières tendances c’est certain. Loin de moi l’idée de dresser un tableau noir sur cette destination mais je voyage beaucoup et je suis sur pas mal de contests donc ça fait un choc de régresser et de faire un tel bond en arrière. Le coté « Hibernatus » m’a plutôt fait marrer et j’avoue que cette période dorée du old school était vraiment fun et s’y retrouver l’espace de quelques jours fait un bien fou.
Concernant le surf, les conditions sont idéales et idylliques, rien d’autre à ajouter. Les vagues sont phénoménales et déroulent à perte de vue. Un vrai bonheur.
Je vous laisse avec les formidables images de JC Pieri et nous tenons à remercier particulièrement Ben Snowden et Mark Gray pour leur accueil.
Avec Chase Gouin Bobby Carter, Amy Stewart-Johnston, Nathan Penonzek, Jesse Puente et Manu Massabova